Méditer les Psaumes de l’Avent

En cette période de l’avent confiné, méditons chaque semaine les Psaumes de l’Avent. Voyez comme ils nous parlent dans notre actualité !

4ème semaine de l’Avent

R/ Ton amour, Seigneur, sans fin je le chante !

L’amour du Seigneur, sans fin je le chante ;
ta fidélité, je l’annonce d’âge en âge.
Je le dis : C’est un amour bâti pour toujours ;
ta fidélité est plus stable que les cieux.

Avec mon élu, j’ai fait une alliance,
j’ai juré à David, mon serviteur :
J’établirai ta dynastie pour toujours,
je te bâtis un trône pour la suite des âges.

Il me dira : Tu es mon Père,
mon Dieu, mon roc et mon salut !
Et moi, j’en ferai mon fils aîné,
le plus grand des rois de la terre !

Sans fin je lui garderai mon amour,
mon alliance avec lui sera fidèle ;
je fonderai sa dynastie pour toujours,
son trône aussi durable que les cieux. »

La répétition n’est pas toujours un signe de sénilité. Elle peut être aussi la manifestation de l’essentiel. L’unique qui compte et mérite d’être dit se doit d’être répété sans cesse. Ici le mot « fidélité » revient
souvent dans la bouche du psalmiste pour nommer le Dieu en qui il met sa foi. Il vaut certes mieux se fier à ce qui est fidèle ! Et « la fidélité de Dieu est plus stable que les cieux. » Voilà une idée qui nous parle, à nous qui avons perdu la stabilité des cieux cosmiques. Nos  cieux, nous savons désormais qu’ils évoluent sans  cesse depuis le big-bang jusqu’à la mort thermique de l’univers. Mais ce qui compte dans tout ce mouvant du cosmos, c’est que les cieux dont il est question dans la foi, eux reposent sur une stabilité plus essentielle à notre vie que tout ce qu’il y a dans le cosmos : l’amour de Dieu !
Dieu ne cesse pas de nous être fidèle : « C’est un amour bâti pour toujours, ta fidélité, plus stable que les Cieux. » Elle porte ce qu’il y a de plus merveilleux dans toute la création, la communion des saints :
« l’assemblée des saints te rend grâce pour ta fidélité, Seigneur ! » Les saints ont su puiser dans la fidélité de Dieu la force de tenir ferme dans la foi. Et leur sens de la foi les a mis sur la voie de la vie éternelle. Jésus, ton apôtre saint Paul nous dit de toi : « Si nous sommes infidèles, lui il reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même » )1) . Ta fidélité, Seigneur, est plus forte que toutes nos infidélités. Elle sait comment réveiller notre foi et raviver en nos vies la joie d’être sauvé.
Frère Pascal Martin
(1) deuxième lettre de saint Paul à Timothée, chapitre 2, verset 13.

3ème semaine de l’Avent – Prier avec le cantique de Marie du dimanche 13 décembre – Luc 1, 46-56

Mon âme exalte le Seigneur,
exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur !
Il s’est penché sur son humble servante ;
désormais tous les âges me diront bienheureuse.
Le Puissant fit pour moi des merveilles ;
Saint est son nom !
Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent.
Déployant la force de son bras,
il disperse les superbes.
Il renverse les puissants de leurs trônes,
il élève les humbles.
Il comble de biens les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
Il relève Israël son serviteur,
il se souvient de son amour,
de la promesse faite à nos pères,
en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais. 

Commentaire du Pape Benoit XVI — février 2006

Le premier mouvement du cantique marial est une sorte de voix soliste qui s’élève vers le ciel pour atteindre le Seigneur. On peut en effet noter la répétition constante de la première personne: «Mon âme… mon esprit… mon Sauveur… me diront bienheureuse… fit pour moi des merveilles…». L’âme de la prière est donc la célébration de la grâce divine qui a fait irruption dans le cœur et l’existence de Marie, faisant d’elle la Mère du Seigneur.

La structure profonde de son chant de prière est donc la louange, l’action de grâce, la joie reconnaissante. Mais ce témoignage personnel n’est pas solitaire et intimiste, purement individualiste… Et ainsi, elle peut dire: « Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent ». Avec cette louange du Seigneur, la Madone donne voix à toutes les créatures rachetées qui, dans son Fiat, et ainsi dans la figure de Jésus né de la Vierge, trouvent la miséricorde de Dieu.

C’est là que se déroule le deuxième mouvement poétique et spirituel du Magnificat. Celui-ci fait davantage penser à un chœur, comme si, à la voix de Marie, s’associait celle de toute la communauté des fidèles qui célèbrent les choix surprenants de Dieu… Autant d’actions que le Seigneur accomplit de manière permanente dans l’histoire: « Déployant la force de son bras… il disperse les superbes… il renverse les puissants… il élève les humbles… il comble de biens les affamés… renvoie les riches… il relève Israël ».

Dans ces sept œuvres divines, le « style » dont s’inspire le comportement du Seigneur de l’histoire est évident: il se range du côté des derniers. Il possède un projet qui est souvent caché sous l’apparence terne des événements humains, qui voient triompher « les superbes, les puissants et les riches ». Et pourtant, sa force secrète est destinée à se révéler à la fin, pour montrer qui sont les véritables préférés de Dieu: « Ceux qui le craignent », fidèles à sa parole; « les humbles, les affamés, Israël son serviteur », c’est-à-dire la communauté du Peuple de Dieu qui, comme Marie, est constituée par ceux qui sont « pauvres », purs et simples de cœur. C’est ce « petit troupeau » qui est invité à ne pas avoir peur, car le Père a trouvé bon de lui donner son royaume (cf. Lc 12, 32). Et ainsi, ce chant nous invite à nous associer à ce petit troupeau, à être réellement membres du Peuple de Dieu, dans la pureté et dans la simplicité du cœur, dans l’amour de Dieu.

Recueillons alors l’invitation que saint Ambroise nous adresse dans son commentaire au texte du Magnificat. Le grand docteur de l’Eglise dit: « Qu’en chacun ce soit l’âme de Marie qui exalte le Seigneur, qu’en chacun ce soit l’esprit de Marie qui exulte en Dieu ; si, selon la chair, la mère du Christ est unique, selon la foi, toutes les âmes engendrent le Christ; chacune, en effet, accueille en elle le Verbe de Dieu…» …

Ainsi, le saint Docteur nous invite à faire en sorte que dans notre âme et dans notre vie, le Seigneur trouve une demeure. Nous ne devons pas seulement le porter dans le cœur, mais nous devons l’apporter au monde, afin que nous aussi nous puissions engendrer le Christ pour notre temps. Prions le Seigneur afin qu’il nous aide à l’exalter avec l’esprit et l’âme de Marie, et à apporter à nouveau le Christ à notre monde.

2ème semaine de l’Avent – Prier avec le Psaume 84 du dimanche 6 décembre – Fais nous revenir !

Tu as aimé, Seigneur, cette terre,
tu as fait revenir les déportés de Jacob ;
tu as ôté le péché de ton peuple,
tu as couvert toute sa faute ;
tu as mis fin à toutes tes colères,
tu es revenu de ta grande fureur.

Fais-nous revenir, Dieu, notre salut,
oublie ton ressentiment contre nous.

Seras-tu toujours irrité contre nous,
maintiendras-tu ta colère d’âge en âge ?
N’est-ce pas toi qui reviendras nous faire vivre
et qui seras la joie de ton peuple ?

Fais-nous voir, Seigneur, ton amour,
et donne-nous ton salut.

J’écoute : que dira le Seigneur Dieu ?
Ce qu’il dit, c’est la paix pour son peuple et ses fidèles ;
qu’ils ne reviennent jamais à leur folie !

Son salut est proche de ceux qui le craignent,
et la gloire habitera notre terre.

Amour et vérité se rencontrent,
justice et paix s’embrassent ;
la vérité germera de la terre
et du ciel se penchera la justice.

Le Seigneur donnera ses bienfaits,
et notre terre donnera son fruit.
La justice marchera devant lui,
et ses pas traceront le chemin.

Extraits de l’allocution de Jean-Paul II le 25 septembre 2002

Le Psaume 84 est un chant joyeux et rempli d’espérance dans l’avenir du salut. Il reflète le moment exaltant du retour d’Israël sur la terre des pères après l’exil babylonien… Retour des déportés, mais également un « retour » spirituel, c’est-à-dire la « conversion ». La renaissance ne concerne donc pas seulement la nation, mais également la communauté des fidèles, qui avaient ressenti l’exil comme une punition pour les péchés commis et voyaient à présent le retour dans leur patrie et la nouvelle liberté comme une bénédiction divine, due à la conversion qui avait eu lieu.

Le Psaume peut être suivi dans son déroulement selon deux étapes fondamentales.

*La première est rythmée par le thème du « retour ».
On célèbre tout d’abord le retour physique d’Israël: tu
fais revenir les captifs de Jacob (v.2);  Fais-nous revenir, Dieu de notre salut… (v. 5-7). Il s’agit d’un don précieux de Dieu, qui se soucie de libérer ses fils de l’oppression et qui s’engage pour leur prospérité… Mais, à côté de ce « retour », qui réunit de façon concrète ceux qui sont dispersés, il y a un autre « retour » plus intérieur et spirituel… qui vaut non seulement pour l’antique Israël, mais pour les fidèles de tous les temps. Le Seigneur agit de façon active dans ce « retour », révélant son amour en pardonnant l’iniquité de son peuple, en effaçant tous ses péchés, en retirant son emportement, en mettant fin à sa colère. Mais à ce « retour » de Dieu qui pardonne doit correspondre le « retour », c’est-à-dire la conversion, de l’homme qui se repent… Souvent, les termes bibliques concernant le péché évoquent le fait de se tromper de route, de manquer l’objectif, de dévier du droit chemin. La conversion est précisément un « retour » sur la voie qui conduit à la maison du Père, qui nous attend pour nous embrasser, nous pardonner et nous rendre heureux (cf. Lc 15, 11-32).

*Nous arrivons ainsi à la deuxième partie du Psaume.
On y décrit un monde nouveau, dans lequel l’amour de Dieu et sa fidélité, comme s’il s’agissait de personnes, s’embrassent; de même, la justice et la paix s’embrassent elles aussi lorsqu’elles se rencontrent. La vérité germe comme lors d’un nouveau printemps et la justice, qui pour la Bible est également salut et sainteté, se présente dans le ciel pour entamer son chemin au milieu de l’humanité. Toutes les vertus, auparavant chassées de la terre en raison du péché, rentrent à présent dans l’histoire et, en s’entrecroisant, dessinent la carte d’un monde de paix. Miséricorde, vérité, justice et paix deviennent comme les quatre points cardinaux de cette géographie de l’esprit… Les paroles du Psalmiste, déjà au II siècle avec saint Irénée de Lyon, ont été lues comme une annonce de l’ « engendrement du Christ par la Vierge ». La venue du Christ est, en effet, la source de la miséricorde, l’éclosion de la vérité, la floraison de la justice, la splendeur de la paix.

 

1ère semaine de l’Avent

Prier avec le Psaume 79 du dimanche 29 novembre

Fais nous revenir ! Reviens !

Berger d’Israël, écoute, toi qui conduis Joseph, ton troupeau :
resplendis au-dessus des Kéroubim,
devant Éphraïm, Benjamin, Manassé !
Réveille ta vaillance et viens nous sauver.
Dieu, fais-nous revenir ;
que ton visage s’éclaire et nous serons sauvés !

Seigneur, Dieu de l’univers,
vas-tu longtemps encore opposer ta colère aux prières de ton peuple,
le nourrir du pain de ses larmes, l’abreuver de larmes sans mesure ?
Tu fais de nous la cible des voisins :
nos ennemis ont vraiment de quoi rire !
Dieu, fais-nous revenir ;
que ton visage s’éclaire et nous serons sauvés !

La vigne que tu as prise à l’Égypte,
tu la replantes en chassant des nations.
Tu déblaies le sol devant elle,
tu l’enracines pour qu’elle emplisse le pays.
Son ombre couvrait les montagnes,
et son feuillage, les cèdres géants ;
elle étendait ses sarments jusqu’à la mer,
et ses rejets, jusqu’au Fleuve.
Pourquoi as-tu percé sa clôture ?
Tous les passants y grappillent en chemin ;
le sanglier des forêts la ravage
et les bêtes des champs la broutent.
Dieu de l’univers reviens !

Du haut des cieux, regarde et vois : visite cette vigne, protège-la,
celle qu’a plantée ta main puissante, le rejeton qui te doit sa force.
La voici détruite, incendiée ; que ton visage les menace, ils périront !
Que ta main soutienne ton protégé, le fils de l’homme qui te doit sa force.
Jamais plus nous n’irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !
Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ;
que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés.

Un psaume qui s’adresse à Dieu, comme à un berger qui conduit son troupeau, ou comme à un vigneron entourant de soin sa plantation unique, ou encore comme à un combattant, soutenant les siens. Images utiles pour suggérer quelque chose de son mystère.

Prière communautaire qui adopte tantôt le ton d’une supplication et d’un appel à l’aide, tantôt celui d’une lamentation. Entre les deux, à trois reprises un refrain :

Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ;

que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés.   

Ce qui amène le peuple à crier vers son Dieu, c’est une expérience de dévastation :

Tu l’as nourri d’un pain de larmes, abreuvé de larmes à triple mesure.

Le peuple se sent pris entre d’un côté, un Dieu apparemment fâché et ne voulant rien entendre, et de l’autre, des adversaires qui raillent.

Pourquoi? Jusqu’à quand? (versets 9-14)

La deuxième supplication vient préciser la situation, à travers l’image de la vigne.

Dans un premier temps, le psaume décrit ce que fut dans le passé la situation enviable de la vigne : sa plantation par Dieu après son prélèvement en Égypte, son enracinement en terre promise, sa croissance et son expansion.

Cette vigne luxuriante, la voilà maintenant envahie, grappillée, piétinée, ravagée et dévorée. Toujours vivante, la voilà qui tremble sur son sort, redoutant d’être finalement réduite à rien par un incendie. Et tout cela en raison de l’apparente négligence du vigneron qui, au lieu de veiller à la protection de sa vigne, a laissé sans soin les clôtures qui l’entouraient.

A travers cette expérience pénible le peuple en est arrivé à craindre pour son avenir.

Reviens enfin! (versets 15-19)

Au cœur de l’épreuve, malgré tout, Israël persiste à espérer.

Si Dieu donne l’impression de se désintéresser du malheur de son peuple, on garde la conviction qu’il peut encore intervenir et renverser la situation.

Reviens, visite cette vigne : en dépit de tout, contre toute espérance, on continue de compter sur Dieu.

Et si c’est parce que nous l’avons négligé que Dieu nous néglige, la résolution est prise, nous nous convertirons : Jamais plus nous n’irons loin de toi.

« Pourquoi? », « comment se fait-il? », « jusqu’à quand? ».

Ces questions-là sont celles des croyants des tous les temps plongés dans l’épreuve et confrontés au silence de Dieu : « Ne vois-tu pas ce qui nous arrive? », « comment peux-tu laisser faire cela? ».

Dans ce psaume, se retrouveront les disciples de celui qui s’est présenté comme le bon pasteur (Jn 10,1-18) et comme la vigne (Jn 15,1-8).

Confrontée à des revirements et à des désinstallations difficiles, à des reculs apparents de la foi, en butte aux ricanements, ainsi vit notre Eglise ; et c’est dans cette ambiance-là qu’elle est appelée à témoigner de l’amour du Christ pour l’humanité : par l’attention portée à ceux qui ont le plus besoin, par le service rendu , par le témoignage de sa confiance,…

Alors, se souvenant de la promesse  Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde (Mt 28,20), les disciples du XXI° siècle entreront dans les supplications, les lamentations et la persistante espérance d’une prière trois fois millénaire.